vendredi 5 mai 2017

Je suis l'âme errante.

 Mexique, 1

Entre toi et moi tout commence.
Traverser l'Atlantique pour que reviennent des images de partout. J'ai passé le pont en fermant les yeux sans vouloir connaître à l'avance les chemins de l'autre côté. Quelqu'un m'y tendra-t-il la main ?

On part à l'aventure parce que cela sonne bien. On a dans la tête quelques images, des peintures de Frida Kahlo, des photos de guerilleros dont on ne connait que le nom, une ou deux idées de rituels maya. Pas plus.
On part le cœur et le ventre plein d'envies et de mystères, la faim au centre, l'espoir dans la poitrine. On sait que de l'autre côté il y aura bien plus, on sait qu'on ne sait pas on en tremble et c'est bien.

Il y a au hasard des rues toujours un petit coin de joie, marchandes de fleurs à foison, jus de fruits frais multicolores, soleil allongé sur les façades jaunes bleues rouges.
Il y a de la musique, beaucoup, pas toujours bonne mais convaincante.
Il y a des chiens. Tout le temps.Gros, moyens, minuscules. El pais de los perros. Les chats se cachent, s'inquiètent, se concertent certainement dans les cours à nos yeux invisibles des maisons.
Il y a des airs de Cambodge, d'Italie, d'Espagne et d'autres pays inconnus.

Les rêves sont faits , sans doutes, de beaucoup de devenir et de beaucoup de ce que l'on aura à mettre de côté. Traverser l'Atlantique, prendre des bus et des taxis, parcourir des routes dont on n'a aucune idée d'où elles mènent et c'est très bien comme ça. La certitude au fond que ce que l'on cherche, ce que l'on attend au bout du chemin c'est simplement ce qui s'y trouvera.

Ne pas compter les regrets du Mexique. Ne pas compter les revers ou les échecs, attentes déçues et idoles déchues. Le voyage est ce qu'on en fait, ce qu'on en retient, mais aussi, surtout, ce qu'on en rêve. Je t'ai beaucoup rêvé Mexico. Je te raconte maintenant et les choses n'ont pas tout à fait la même saveur.

Un récit de voyage c'est la difficulté de trouver la ligne fine entre ce que l'on a vécu et ce que l'on a rêvé. Funambulisme délicat. Un voyage c'est autant le moment présent que l'avant. Et si l'on veut le dire aux autres, il faut par honnêteté aussi leur raconter tout ce que l'on en a souhaité.

Où cela a-t-il commencé ? Je croyais que c'était un jour d'hiver berlinois, au Martin Gropius Bau , découvrant les œuvres de Frida et laissant petit à petit la lumière et les couleurs de Mexico s'immiscer à travers le grau de Berlin, s'immiscer à travers ma peau et panser le froid.
Cela a ensuite certainement continué par des paroles dans les bouches des autres, récits de vie de ce côté de l'Atlantique, noms inconnus sur les offres d'emplois mal payées mais si attirantes. Dernièrement aenfin il y avait eu cette sorte de confirmation, un concert ,la Tigrada, découvrir que des Mexicains se déguisent en tigres pour défiler une fois par an. Concert pour recoller un peu les morceaux de mon cœur, toujours celui là, qui se brisait doucement devant les farces du destin.

Je cherche où commence le fil, toujours. Quels mots m'ont menée jusqu'ici? A la bibliothèque de Mexico, comme dans les musées de Kyoto, c'est Ersnt qui surgit. J'ai les pupilles en grand format. En réalité cela a certainement commencé sur les bancs du lycée, le nez plongé dans Breton « Je suis l'âme errante ». Et de ses errances à lui, à elle, Nadja, lancée dans mes errances à moi.
D'un aller depuis Marseille à un retour qui n'est pas celui-là. En France, je suis encore en chemin pour ce que je ne sais pas. Départ-Retour-Envol-Saut.
En rentrant j'ai sauté à pieds joints dans le nuage dit « réalité » espérant qu'il soit parsemé de petits bouts de rêves.

Il ne s'agit plus à présent que de les collecter.






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