dimanche 25 octobre 2020

A tâtons

 Je voulais écrire

sur la douceur d'hier

le bon du soleil sur les peaux

et du chaud dans les coeurs

sur les mains serrées des amoureux

et les tâtonnements joyeux des miennes

Sur l'envie conquérante et heureuse

qui faisait palpiter les corps 

l'un contre l'autre

sur les bancs de sable d'une plage en automne.


Je voulais parler

du parfum singulier

d'une glace en octobre

du goût volé à juin, aout, juillet

prenant à bras le corps

l'été indien

Parler de ces conversations banales,

attrapées au croisement des passants

et des mots tout simple qui sortent des bouches

sans grand intérêt, et si importants.


Je voulais chanter 

le retour du printemps

tout au coeur de l'automne

et laisser le temps

faire son job

et regarder la mer, la mer

la mer encore

qui s'étale et paresse 

tandis que moi, je cherche.




jeudi 15 octobre 2020

Le couteau

 Un jour, tu m'as offert

un couteau.

Les gens se sont exclamés :

"Malheur à celui qui reçoit le couteau!"

Le même jour, je t'ai offert

un couteau.

Les gens se sont écriés :

"Malédiction pour celui qui reçoit le couteau!"

Et nous, nous avons sourit

et nous, nous avons rangé chacun le couteau dans notre poche

et nous l'avons utilisé, usé, aiguisé, refermé dans son tiroir

et nous avons continué nos vies

Nous nous sommes couchés dans le même lit, enlacés dans la cuisine au petit matin, 

nous avons parcourus ces rues ensemble, les rues de notre quartier vers des moments gais et tranquilles.

Nous n'avons pas pensé au couteau.

Le printemps venu nous avons troqué nos lourds manteaux contre des draps légers et nous avons couru vers les eaux claires de ce lac qui depuis longtemps nous appelait.

Nous nous sommes réveillés l'un à côté de l'autre comme tant de matins et nous avons rit du soleil sur l'oreiller, rit du pain dans le four et des promesses sur nos mains.

Nous avons bu l'eau des rivières avec nos yeux et nos oreilles dans les montagnes vertes, nous avons pétri la farine et les oeufs des repas de fête, toujours le sourire aux lèvres et nous avons chanté plus fort lorsque la nuit tombait.


Un matin nous nous sommes réveillés pourtant dans des lits différents. Un matin tout était terminé.

Nous n'avons pas pensé au couteau.

Walden Pound, Massachussets, from the Lonely Planet



mardi 6 octobre 2020

le Batteleur et le Mat

 Commence et choisis.

N'hésite pas.

Saisis-toi d'une chose et ne la lâche pas, oublie les autres et avance tout droit.

Tu dois te lancer. 

Tu as devant toi tout ce qu'il te faut et tout ce dont tu n'as pas besoin, alors vas-y, commence et choisis.


J'ai préparé mon grand mouchoir tu sais, je l'ai lavé, repassé et plié soigneusement en quatre, rangé dans 'l'armoire. Il attend sagement que je vienne le prendre et que je m'en serve, le moment venu. Celui où je dirai aurevoir.


Avance et décide,

Décide du chemin, du nombre de pas , de la destination si tu le souhaites.

Laisse les rencontres aux hasards et à ses doigts malins, ne te trouble pas, reste concentré, ne doute pas de ce que ta main a saisi et ne pense plus à ce qui a été laissé sur la table.

Il est temps de partir, en voyage et pour toujours, il est temps de ne plus se retourner, d'accepter ce qu'il y a devant et de ne plus penser à ce qui est derrière,  il est temps d'ouvrir l'armoire.



Le soleil

 C'est bien ironique, tu te caches depuis le début, tu n'apparais que par fragments, tu te joues de mon moral et de mes prévisions . Le soleil. Carte positive par excellence à moins que l'on ne soit desséché déshydraté à moins que l'on n'ait même plus de larmes pour te pleurer c'est rageant soleil tant que tu n'es pas là je suis sèche à l'intérieur et dehors il pleut il pleut il pleut encore et mes yeux restent secs et mes yeux restent fixes comme les tiens sur cette carte. Une journée de soleil et les pleurs reviennent à moi or depuis 10 jours tu es à peine là. Peut être est-ce ce qui vraiment se passe, peut- être le ciel pleure-t-il pour moi. Alors on se moque un peu parce que je prédis la pluie, on me traite de Cassandre ne voyant que le mal advenir mais c'est que l'on n'a pas compris que plus que jamais mon corps est plein de larmes que plus que jamais si vous me secouez c'est tout ce qui en sortira et que puisque le ciel semble avoir pris la décision de me remplacer dans ce déversement d'eau, je peux vous dire avec aplomb, oui il va pleuvoir, oui cela continuera car j'ai le coeur en morceaux et je ne vois pas quand cela ne sera plus le cas.




jeudi 1 octobre 2020

La justice

 Arbre, quel est ton nom?

Ruisseau, quel est ton nom?

Je tends l'oreille espérant que vous me soufflerez les réponses, je ne crois plus rien de ce qui est écrit dans les livres, je crois que vous seuls pouvez me dire si ce que je cherche existe, si ce que je cherche a un nom.

S'il n'en a pas, nous lui en donnerons un, vous avec moi comme un seul être fait de mousse, d'eau, de terre, d'écorces et de sang.

Combien d'esprits chantent dans vos branches et dans votre lit?

Je construirai un temple modeste de mes modestes mains et y glisserai de petits présents, des mots doux à vos oreilles,

j'y célébrerai un culte, bien plus beau  bien plus puissant que tous les cultes existants, à votre image.

Les passants pourront venir s'y réchauffer l'âme, à défaut d'autre chose, l'âme et le coeur auprès de vos doigts caressants.

Alors dis moi, Arbre, quel est ton nom?

Ruisseau, quel est ton nom?

Tandis que je cherche, interpelle  et bute sur le nom des choses, vous vous êtes là.

3L'équilibre, la perfection, ce n'est pas la symétrie" et dans le désordre de vos racines, de vos feuilles et  de vos cascades, résonnent le parfait le plein et l'harmonie.

Je construirai un temple modeste, je n'écrirai pas de nom sur le fronton, j'oublierai le mien et je m'endormirai lorsque viendra l'averse.